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12 mai 2012

Alger sans Mozart de Canesi et Rahmani

Alger sans Mozart

"- Le gâteau est trop petit, disait-il, nous sommes affamés, si vous le partagez avec nous, il ne vous restera que des miettes.
Ainsi résumait-il la question algérienne : pour accéder au gâteau, il fallait nous chasser ! Je n'acceptais pas ses propos d'un anticolonialisme primaire.
- Je veux bien admettre que la colonisation est intrinsèquement mauvaise, il n'en demeure pas moins que nous sommes là et qu'il faudra faire avec nous. Nous ne sommes pas tous d'horribles colonisateurs. La majorité des pieds-noirs travaille avec le même dévouement, la même ferveur pour le bien de tous, indigènes et Européens.
- Nous voulons la liberté et l'honneur, Louise.
Je pris ses mains :
- Pourquoi t'attaches-tu à moi, Kader ?
- Je ne sais pas... tu es belle et puis quelque chose en toi m'émeut.
- Je suis belle comme la France et je t'émeus comme la France !"
Alger sans Mozart est un roman choral, une partition a plusieurs voix. Celles de Louise et Kader ; celle de Sofiane, fils de l'Algérie nouvelle, hybride dont la vitalité redonne à Marc, le metteur en scène parisien cynique, créativité et goût de vivre, préfigurant ce que pourraient être les relations apaisées entre les deux rives de la Méditerranée, le Sud débordant irriguant le Nord blasé.
Alger sans Mozart est un hommage aux exilés. Un hommage à la douleur des pieds-noirs qui ont aimé ce pays, lui ont donné le meilleur d'eux-mêmes et l'ont quitté sans jamais trouver une reconnaissance.
Un hommage à l'Algérie et aux Algériens écrasé par la destinée.
Alger sans Mozart est une mosaïque qui met en lumière soixante ans de schizophrénie. La schizophrénie de deux pays qui refusent d'admettre leurs liens irrémédiables.
Ce roman écrit par un Algérien et un Français s'attache à reconstituer le puzzle si complexe de l'Histoire commune aux deux pays.
Sans concession...

C'est dans le cadre de mon partenariat avec PTitBloG que j'ai reçu ce livre. Et, j'avoue que lorsque le livre est arrivé, j'ai de suite était complètement fascinée par la photo de cette femme en couverture.
Tout le charme des photos des années 60 y est concentré mais c'est surtout son expression qui m'a interpellée : "Qui regarde-t-elle avec autant d'Amour ?"

Je me suis alors plongée dans l'histoire... ou devrais-je dire dans l'Histoire ?

Ce roman est raconté à trois voix.

Il y a d'abord celle de Louise, rocailleuse, nostalgique et amoureuse, que j'aime imaginer accoudée à son balcon, au crépuscule, à contempler Alger au son des concertos de Mozart.
Louise a été belle, indomptable et passionnément amoureuse de Kader, que sa famille lui interdisait de fréquenter, mais avant tout d'Alger, sa ville. Louise est algérienne, parce que née en Algérie. Elle revendique ce droit du sol et refuse obstinément de se considérer comme française ou même pied-noire. Ses voisins, quant à eux, ne lui accordent pas cette reconnaissance. Elle ne peut être Algérienne parce qu'elle n'a ni le sang ni la religion de ce pays qu'elle aime plus que tout et finira par apprendre, avec beaucoup de douleur que :

"[...] on ne peut être de deux bords à la fois, qu'il faut choisir ou risquer d'être rejetée par les deux rives."

Nous découvrons son histoire au fil de ses rendez-vous avec Sofiane, son jeune voisin, à qui elle raconte l'Algérie d'avant, lui qui représente l'Algérie d'aujourd'hui. C'est par les mots de Louise qu'il apprend une partie de l'Histoire de son pays et tente de comprendre pourquoi la jeunesse algéroise souffre tant alors que la jeunesse française à tout.

Lorsque Marc, le neveu de Louise, metteur en scéne désabusé et mal dans sa peau, décide de retourner en Algérie, il conjuguera les mots de l'une avec la vie de l'autre pour en faire un magnifique témoignage en forme de paralléle : la décrépitude physique de Louise témoignant des difficultés du Pays.

Ce livre, écrit à quatre mains, lie à ravir la sensibilité Française et la sensibilité Algérienne comme pour nous faire prendre conscience de la douleur de ces "deux soeurs" séparées par la Haine, la Guerre, l'Histoire, l'Incompréhension.


L'édition est absolument magnifique, le papier est épais et agréable à tourner, le format donne presque l'impression d'ouvrir un album de photos... et c'est vraiment le sentiment qui en ressort tellement l'écriture est forte, visuelle, parfois même odorante.

J'ai noté beaucoup de très belles phrases, mais la seule que je vais vous livrer sera celle-ci :

"Les parfums de nos vies sont les mots d'amour de nos morts."

Et bien que Louise aime passionnément Mozart, c'est avec Mariem Labidi que je vais vous laisser, parce que c'est cette chanson qui a résonnée en moi pendant toute ma lecture :

 

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Commentaires
C
Oh que oui alors, la couverture est superbe... tout comme l'histoire d'ailleurs.
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M
Il a l'air très beau, ce roman. La couverture est vraiment magnifique !
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C
C'est un vrai voyage dans le temps et dans un pays que nous, français, ne connaissons que trop peu, finalement.
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T
Je me le note parce qu'il a l'air dépaysant.
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C
C'était vraiment un très beau moment de lecture.<br /> <br /> <br /> <br /> Bon week end.
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