les harmoniques

Les Harmoniques
Folio noir
Le 17.01.2013

Vera est morte assassinée. Brûlée vive. Mister, le pianiste, l'aimait, comme elle aimait sa musique. Il veut comprendre : qui l'a tuée ? Pourquoi ? Avec son ami Bob, chauffeur de taxi philosophe et polyglotte, il cherche, tâtonne, interroge et remonte peu à peu le fil de la jeune vie de Vera, jusqu'aux rives lointaines du Danube, jusqu'aux charniers des Balkans... Rythmée par les grands standards du jazz, l'enquête des deux hommes fera ressurgir les notes cachées de ces crimes dont personne ne veut parler.
Plus qu'un roman, c'est une ballade qui se joue ici. Un long blues nostalgique et envoûtant en même temps qu'un poignant chant d'amour et de rage.

Quand j'ai croisé Marcus Malte, il y a peu, l'homme arborait la clope aux lèvres et le regard contemplatif engagé vers la mer.

Pour une fois, le gus a troqué sa Méditerranée pour la Manche à l'occasion du festival du Polar au Havre.

L'auteur est fascinant car il dégage un petit côté mystérieux, comme dans ses livres.
Pour ma part, il s'agit du deuxième roman policier que je lis. Son œuvre se densifie et il faudra sans conteste que j'aille y retourner un jour dans cette vaste bibliographie. Car j'aime son écriture limpide et j'espère qu'il en sera de même pour vous.

Un livre de Malte sans musique n'est pas un livre de Malte !

Il soigne sa réputation encore une fois avec cet ouvrage réussi.
La toile de fond, c'est le Jazz, même si Les Beatles et Demis Roussos viennent fiche leur grain de sel à un certain moment bien précis (2 mendiants Slaves répétant en boucle quelques standards pour une petite pièce).

Mais pas seulement, car il y a un autre fond bien plus noir. En l'occurrence, le conflit des Balkans durant les années 90.
Marcus Malte évoque sans complaisance cette période de guerre qui a décimé l'ex-Yougoslavie. Tout cela est instrumentalisé durant cette enquête.
Enquête bien ficelée où les deux pseudos enquêteurs, qui n'en sont pas ! Du moins, pas de la Maison, comme on dit du côté du Quai des Orfèvres.

Bob est loin d'être une éponge ! Je vous le dis moi !

Cet agrégé de philo, ne manie pas moins de 17 langues ! Mais bon çà, ce n’est pas son intérêt à Bob. Bob, son kif c'est de faire le taxi à bord de sa quarantenaire 404 Peugeot. Jaune s'il vous plait ! Et son grand kif c'est de parcourir la nuit les rues sombres avec son pote Mister en écoutant les grands standards du jazz dans son lecteur K7. Le sol de la Peugeot est jonché de ces reliques.
Mister, lui c'est un black, une montagne de black aux mains qui ressemblent plus à des battoires qu'à autre chose. Mais Mister est un gros dur au cœur tendre. Ses passions sont le Jazz et le piano. Piano qu'il exerce dans un bouge parisien, Le Dauphin vert.

Chers lecteurs, je serais vil et menteur en ne vous disant pas que Mister avait une autre passion. Elle s'appelait Vera. Elle était âgée de 26 ans, croate d'origine et belle. Très belle ! Elle venait au Dauphin régulièrement écouter et se régaler des harmoniques de Mister et de ses acolytes.
J'emploie le passé. Vous l'aurez compris Véra Nad n'est plus de ce monde. Retrouvée carbonisée dans un entrepôt désaffecté, la nymphe n'a pas eu le temps de dire ouf. Le trépas était bien trop proche d'elle.

Mais qui a bien pu lui en vouloir à ce point pour lui ôter la vie ? Mister et Bob (et leur 404 !) mèneront l'enquête sans relâche aucune.

Malte nous emmènera au sein de la filière Serbo Croate Parisienne avec leurs personnages atypiques et bien déjantés pour le coup ! Comment La belle et théâtrale Vera s'en est elle retrouvé à poser nue pour un étrange peintre ? Les dangers seront de la partie, mais attention, le binôme en a sous la casquette. Mister a l'oreille et Bob le flair !

Ce roman se lit facilement, j'ai beaucoup aimé la profondeur des personnages. Ce Mister nous colle à la peau tellement Marcus Malte l'a bien structuré, tout en le dotant d'une forme d'âme invisible.
Nous voyageons aussi dans ce livre. Pas seulement de Paris à Vukovar, mais aussi dans une histoire pas si lointaine et tellement douloureuse entre Serbes, Croates et Bosniaques. Malte n'y va pas par quatre chemins pour nous donner son point de vue sur les spectateurs, comptabilisateurs internationaux quant à ce tragique épisode des Balkans. Enfin pour conclure j'ai bien aimé la façon dont l'auteur nous fait revenir parmi nous (revivre en quelque sorte !) la jeune femme à travers des débuts de chapitre, le plus souvent en italique à travers ses souvenirs...

Marcus Malte peut continuer à contempler la mer, d'y puiser son génie pour poursuivre son œuvre. On n'y verra pas d'inconvénients !

Bonne lecture à vous !

Bruno

Les Harmoniques de Marcus Malte

Partager cet article