purple cane road photo (2)

Purple Cane Road de James Lee Burke
Rivages Noir N° 638 (2007)
première édition aux USA en 2000

Elle s'appelait Mae Robicheaux, née Guillory. Elle avait quitté son foyer pour fuir un mari alcoolique, alors que son fils n'était encore qu'un gamin. Elle était devenue serveuse dans une boîte de Purple Cane Road et, un jour, avait trouvé la mort à quelques kilomètres de là, dans des circonstances jamais éclaircies. C'est le meurtre d'un petit maquereau nommé Zipper Clum qui fait remonter toute l'histoire à la surface, et c'est ainsi que Dave Robicheaux se met en quête des assassins de sa mère. Emouvante plongée dans le passé du personnage fétiche de James Lee Burke, Purple Cane Road est l'un des chefs-d'œuvre de l'auteur.

Se faire son premier Lee Burke à bientôt 50 balais tout en se prétendant fana de polar, c’est un peu léger !
Découvrir ensuite le travail et la notoriété de l’individu, je me dis que j’ai failli passer à côté de quelque chose. Merci donc au hasard, quand, chez ce soldeur où j’ai pour habitude de faire mes emplettes au Havre, ce Rivages Noir en parfait état de conservation m’attendait à coup sûr, afin de combler cette lacune de méconnaissance.

Louisiane. New Iberia. Quand un maquereau informateur apprend à l’inspecteur de police de métier, Dave Robicheaux, qu’au milieu des années 60 deux flics véreux à la solde d’une grosse frappe locale ont tué sauvagement une femme dans la paroisse de Lafourche. Et que de surcroît cette dernière portait comme nom de jeune fille Guillory, Mae Guillory qui deviendrait plus tard Mae Robicheaux en rencontrant son alcoolique de mari.
Mae s’avère donc la mère de notre inspecteur et vous comprendrez cher lecteur que dès les premières dizaines de pages de ce roman que je qualifierai de « Western-bayou » moderne, que la pugnacité de Robicheaux sera décuplée afin de retrouver le ou les assassins de sa maternelle. Il ne lâchera pas l’affaire et la mènera coûte que coûte à son terme, quitte à prendre parfois de gros risques.
C’est dans l’ambiance poisseuse des bayous de Louisiane que James Lee Burke nous emmène tout en remontant le fil du passé de son personnage principal. Le maquereau de sous envergure retrouvé mort n’aidera certes peu à faire avancer l’enquête hormis dans la tête de l’enquêteur qui pense que la balance n’a pas été refroidie par hasard. Faut-il y voir une source de vérité sur le meurtre de sa mère ?

Sur le parcours de l’enquête Robicheaux croisera le chemin d’un personnage bipolaire (tripolaire devrais-je dire !) : Johnny Remeta alias Johnny O’Roarke. Plus le roman avance, plus ce psychopathe inquiétant colle aux basques de Dave jusqu’à s’immiscer dans sa propre vie en s’entichant d’ Alafair*, sa fille.
En parlant de filles vous croiserez les portraits des sœurs Labiche, Letty et Passion. La première sera condamnée à mort pour le meurtre d’un bourreau local qui habitait dans une maison en bois au cœur d’un Bayou ,après s’être fait justice. Pour réparer l’irréparable, pour se purger l’esprit de s’être faite abusée sexuellement par ce bourreau préposé à la chaise électrique au service de l’Etat. Sa sœur n’étant pas du reste concernant les sévices. !
Les fillettes à l’époque travaillaient au service de ce Vachel Carmouche comme baby-sitter et le craignaient énormément, et pour cause !! Dave Robicheaux se servira de la seconde sœur pour lui soutirer des informations°, qui, pour le coup lui feront ressurgir son propre passé…Passé étouffant comme la moiteur des Bayous,qui nous fait progresser dans une forme de labyrinthe avec de tordus personnages qui ont malheureusement accompagné Mae Robicheaux de près ou de loin. La détermination de Dave permettra t’elle de retrouver le ou les assassins de sa mère ?

Purple cane road est considéré comme un des chefs d’œuvre de l’auteur et j’ai pris un réel plaisir à découvrir cet auteur, son écriture précise et ciselée , la qualité de la mise en place des différents personnages et de leurs descriptions..Le voyage dans la Louisiane des années 60, puis bien plus tard est d’une richesse incommensurable.
Enfin l’atmosphère ressentie tout au long du livre est divine. Seules quelques longueurs au milieu du roman , et d’ailleurs qu’on oublie vite car le rythme ensuite est soutenu, plus la fin approche moins on a envie de lâcher le bouquin. C’est là le signe irréfutable d’un bon polar. D’un très bon polar !!**

Bonne lecture.

Bruno

*Alafair est aussi le prénom de la fille de James Lee Burke , qui écrit également des romans policiers.
** La série Robicheaux compte de nombreux volumes et celui-ci particulièrement met en avant le passé de son personnage principal qui, parfois devient autobiographique quant au passé de l’auteur.
Série Robicheaux =
1. La Pluie de néon, The Neon Rain (1987)
   2. Prisonniers du ciel, Heaven's Prisoners (1988)
   3. Black Cherry Blues, Black Cherry Blues (1989)
   4. Une saison pour la peur, A Morning for Flamingos (1990)
   5. Une tâche sur l'éternité, A Stained White Radiance (1992)
   6. Dans la brume électrique avec les morts confédérés, In the Electric Mist with Confederate Dead (1993)
   7. Dixie City Jam (1994)
   8. Le Brasier de l'ange, Burning Angel (1995)
   9. Cadillac Jukebox (1996)
   10. Sunset Limited (1998)
   11. Purple Cane Road (2000)
   12. Jolie Blon's Bounce (2002)
   13. Dernier tramway pour les Champs-Élysées, Last Car to Elysian Fields (2003)
   14. L'Emblème du croisé, Crusader's Cross (2005)
   15. La descente de Pégase, Pegasus Descending (2006)
   16. The Tin Roof Blowdown (2007)
   17. Swan Peak (2008)
   18. The Glass Rainbow (2010)
   19. Creole Belle (2012)

Extraits :

« A l'âge de 19 ans, j'avais travaillé au large, sur une barge sismographique que les ouvriers du pétrole appelaient camionnette. C'était l'été 1957, l'été où l'ouragan Audrey avait provoqué, sur le Golfe du Mexique, un raz de marée gigantesque qui avait frappé la ville de Cameron en Louisiane, et l'avait effacée de la surface de la terre, en tuant des centaines de personnes.

Des semaines durant, on retrouva des cadavres dans les fourches des gommiers du marais ou dans les îlots de cyprès déracinés de leurs marécages et partis flotter jusque dans le Golfe. Parfois, les longs câbles d'enregistrement gainés de caoutchouc que nous tirions depuis la poupe et le proue du « cruchon », notre barge de forage, s'accrochaient aux branches d'un arbre submergé au beau milieu d'une baie ou d'une rivière. Un membre de l'équipage était alors obligé de descendre pour les dégager. »

« Tard un après-midi de juillet, je descendis à 5 mètres jusqu'à toucher le tronc lisse et boueux d'un énorme cyprès. J'avançai à tâtons le long de l'écorce et me cognai à l'amas de radicelles d'où je dégageai le câble en le faisant glisser de la racine centrale.

Un nuage de boue grisâtre pareil à un champignon se leva autour de moi, comme si je venais de déranger une enveloppe d'air froid prise au piège du labyrinthe de

racines. Soudain le corps d'une femme se dressa au sortir de la vase et vint se coller à moi, sa chevelure glissant sur mon visage, sa robe flottant au-dessus de ses sous-vêtements, les bouts de ses doigts bagués venant effleurer ma bouche.»

Purple Cane Road de James Lee Burke

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