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8 mars 2017

Requiem a confessé Pierrot....

Le Confessionnal

 Moi tu m’connais maintenant, je suis Requiem, le curé de tes rêves…

Prêtre exorciste, membre de la Sapinière, grande gueule, aventurier, chaud lapin et romancier à mes heures.

Tu le sais ma chérie que j’aime te raconter des histoires, des belles histoires pour te faire rêver et des moins belles pour te faire réfléchir...

Ben aujourd’hui, je voudrais te causer d’un type qui vient tous les dimanches matin à la représentation. Dans les premiers rangs il est là, il suit, il chante, il prie, il se signe. Un bon élève.

Pierrot, c’est un gars un peu bourru, mais un gars qui ne perd jamais une occasion de faire un cadeau à sa rombière, pas comme toi, salopard (je sais que je suis lu aussi par des hommes, alors je m’adapte dans mes remarques...)

Pierrot offre toujours des fleurs à Nina en ce jour de « la journée de la femme ». Bien sûr certains vont dire que c’est la journée des droits de la femme, pas de la femme. Racontez cela à Pierrot je suis convaincu qu’il vous répondra simplement :

—  J’m’en fous, moi ce qui compte, c’est d’offrir des fleurs à Nina !

roserouge

Voilà, pour Pierrot, les droits de la femme c’est totalement abstrait, il s’en cogne, s’en bat les aumônières avec une pelle à tarte, rouillée de surcroît, pour te dire. Il veut juste lui offrir des fleurs à sa Nina. Point barre.

Comme pour son anniversaire, sa fête, la fête des mères —   ben ouais, Nina est la mère de ses deux gosses — Noël, Pâques, la Saint Valentin… Chaque occasion est bonne pour que Pierrot offre des fleurs à Nina (Alors que moi je préfère t’en offrir à la Saint-Claude, si tu vois ce que je veux dire).

Alors il n’en a rien à braire de savoir si c’est la journée de la femme, ou la journée des droits de la femme. Pour lui c’est juste un bouquet de roses rouges en plus pour sa Nina. Ce bougre aurait dû prendre des actions chez Interflora, c’est pour te dire ce qu’il crame comme oseille là-dedans. C’est devenu une lubie de lui offrir des fleurs, de la couvrir de fleurs.

Toujours des roses rouges, jamais autre chose. La première fois qu’il a décidé de ce qui est devenu aujourd’hui un rituel, la petite fleuriste lui avait demandé :

—  Vous voulez quoi comme fleurs ?

—  Chais po…

—  C’est pour offrir pour quoi ?

—  Pour faire plaisir…

—  C’est qui la personne pour vous ?

—  Ben c’est Nina, c’tte question con !

La petite fleuriste restait calme et souriante face à cet homme bougon et bâtit comme une armoire normande. Elle voulait le conseiller, l’aider, elle trouvait gentil qu’il veuille offrir de fleurs à sa femme, autant que celle-ci soit heureuse que les fleurs aient une belle signification. Elle aurait bien aimé elle, que son copain lui offre de temps en temps un joli bouquet, même si elle est fleuriste.

—  Et Nina c’est ?

—  Ma femme…

—  Alors prenez des roses rouges.

—  Pourquoi ?

—  C’est le symbole de l’amour la rose rouge.

—  Alors oui, c’est bien ça l’amour. Alors un gros bouquet de roses rouges.

Et depuis Pierrot ne se posait plus la question, il entrait chez la fleuriste et demandait un gros bouquet de roses rouges pour Nina.

Et aujourd’hui, en cette journée des droits de la femme, comme toutes les autres fois où il offre son gros bouquet de rose rouges à Nina, Pierrot chiale comme un con.

Il couine comme un goret parce que ses fleurs il les dépose dans un grand vase de granit noir au pied de la tombe où repose Nina.

15 ans que Nina est morte…

15 ans que Pierrot est seul.

15 ans qu’il lui offre des roses rouges dès qu’il peut.

15 ans qu’elle est défuntée sous les coups répétés de Pierrot.

15 ans que ce fut la dérouillée de trop, celle où Nina vola en arrière sous une gifle plus appuyée que les autres.

15 ans que son crâne avait éclaté comme une coquille d’œuf contre l’évier de la cuisine.

Ploc !

15 ans que ce con s’en veut…

15 ans qu’il ne boit plus, mais ça sert à rien, elle n’est plus là. Mais quand il avait bu, il voulait qu’elle écarte les cuisses, elle, elle voulait un peu de douceur, de tendresse. Lui il voulait la baiser, alors s’il le fallait, il te l’a faisait mouiller avec une belle avoinée, histoire qu’elle sache que le boss c’était lui.

Bordel de merde, le devoir conjugal, ça ne lui disait rien à cette salope ? De toute façon elles ne comprennent que comme ça…

Il a fait un peu de tôle, ses gosses lui causent plus, il est seul au monde. Chaque dimanche il expie sa misère sur les bans de mon église.

Crois pas que j’ai pitié de lui, loin de là. Je lui souhaite juste de vivre très vieux, excessivement vieux. Un bon centenaire avec les regrets et les remords comme seuls compagnons de sa connerie.

Patron, prend soin de Nina, merci…

Chaque jour dans le monde, en France, à côté de chez toi, des femmes meurent sous les coups de leurs maris, elles sont battues, humiliées, violées…

Ce n’est pas une journée qui changera quelque chose, et encore moins un bouquet de roses, ni même ce texte d’un curé de pacotille. Mais prenez soin d’elles, c’est elles qui vous ont donné la vie, et qui vous donneront vos enfants...

JourneeFemme

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Commentaires
R
Superbe !
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T
Très beau texte, mon curé.
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