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20 septembre 2015

L'amour est une île de Claudie Gallay

lamourestuneile

L’AMOUR EST UNE ILE de Claudie Gallay
Editions Actes Sud (2010) puis Babel N° 1315 (mai 2015)
448 pages.

C'est une saison singulière pour Avignon et les amoureux du théâtre : la grève des intermittents paralyse le festival et de nombreux spectacles sont annulés. Comédienne devenue célèbre depuis qu'elle est partie, Mathilde revient dans cette ville où elle a grandi, et pour un rôle magnifique. L'homme avec lequel elle a naguère vécu une grande histoire d'amour n'a jamais quitté la Cité des Papes. Directeur d'un petit théâtre, il a pris cette année-là tous les risques. 
Il met en scène une pièce d'un auteur inconnu, mort dans des circonstances équivoques : un certain Paul Selliès dont la jeune soeur vient elle aussi d'arriver à Avignon, un peu perdue, pleine d'espérances confuses - ou de questions insidieuses. Car autour de l'oeuvre de Paul Selliès plane un mystère... Plongée au coeur des rêves et des mensonges, des retrouvailles sans lendemain, des bonheurs en forme de souvenirs et des amours qu'on abandonne, L'amour est une île noue et dénoue les silences d'un été lourd de secrets.

On dîne chez de nouvelles connaissances, on rigole bien, le repas est savoureux, j’en profite pour jeter un œil sur la bibliothèque de la propriétaire. Madame est lectrice. Quelle aubaine inattendue... Sur son conseil je repars avec un livre en prêt.
Prudent, je me fie davantage à la maison d’éditions qu’au titre du livre et je commence dès le lendemain à avoir deux idées en tête. Comment réussir un flan de courgettes aussi moelleux et goûteux comme apprécié la veille et débuter ce grand format de chez Actes Sud.  Maintenant que ce livre est terminé je vais donc vous en toucher quelques mots.

La toile de fond de ce roman est le festival d’Avignon et plus particulièrement le festival d’Avignon de l’année 2003 où des mouvements de grève importants des intermittents du spectacle ont perturbé puis ont conduit à l’annulation du off et du in.

Il se dégage de ce roman trois protagonistes et un quatrième sous forme d’un texte. Un texte  qui revient sans cesse dans l’ouvrage de par son auteur, de par sa métamorphose en pièce de théâtre puis en livre. De par ceux qui se le sont approprié, modifié, promu également. 

 Voici donc :

Odon Schnadel féru de théâtre possède le sien, le Chien Fou dans le centre de la cité des papes. Quand il n’y passe pas le quart de son temps, il demeure dans sa péniche en  compagnie de Big Mac, son fidèle compagnon de plongée. Un crapaud. Jeff est son autre compagnie, un humain cette fois ci. L’homme à tout faire du Chien Fou aussi. Odon est tombé fou amoureux de Mathilde, une comédienne. Et pas n’importe laquelle !

La Joguar, ou plutôt Mathilde, a fait ses débuts en Avignon, a bossé avec Odon qui l’a dirigée, en est tombée folle amoureuse puis est partie cinq ans avec le succès en retour. Elle est reconnue comme une émérite et talentueuse comédienne dans la France entière. Le fait d’avoir été nommée par ses pairs La Jogar lui confère une dimension particulière, mystérieuse et volatile.

Marie est une écorchée vive aux piercings nombreux, un peu un look à la Lisbeth Salander avec accessoirement un appareil photo.  Elle est aussi et surtout la sœur de Paul Selliès, le frère qu’elle a adulé. Paul qui a écrit un texte extraordinaire avant de disparaître de notre Monde. Marie baroude jusqu’en Avignon accompagnée d’un petit sac à sa ceinture contenant les cendres de son défunt frère. Le fleuve et la péniche d’Odon ne tarderont pas à l’accueillir. Quel accueil ! Et déambulera à travers ce festival tendu et déboussolé, évitant des intermittents en furie, afin de retrouver les traces du texte de Selliès. Enfin, elle s’automutile.

Ces trois personnages vont s’entrecroiser avec en arrière plan un festival d’Avignon paralysé. L’amour passionnel entre Odon le Directeur, la référence en matière du « off » de la ville et La Jogar renaîtra t’il ? Marie réussira t’elle à obtenir la vérité quant au manuscrit de son frère, et par quels moyens ?

Ce roman est écrit de phrases courtes, parfois très courtes,  jamais dénuées de sens. Il y a aussi  de nombreux renvois à la ligne. On s’habitue assez rapidement à ce style (si l’on peut dire)  et l’on pénètre dès le début du livre rapidement dans l’univers du Théâtre et particulièrement de ce Festival international.
L’ouvrage transpire, suinte le Théâtre avec un T majuscule s’il vous plait, et pas seulement parce qu’on y cite Gérard Philippe et Samuel Beckett. Claudie Gallay nous immisce totalement dans cet univers, et les gens qui le composent. Grâce à l’auteure, Avignon nous ouvre les portes de ses théâtres, ruelles, cafés et autres environs pittoresques. *  Elle s’inspire largement des événements réels de 2003 où le festival en pleine crise avait été fortement malmené par de puissantes et durables grèves. **

J’ai beaucoup apprécié ce livre inattendu dont le titre pourrait faire penser à une romance. C’est beaucoup plus que cela !
Un livre formidable qui, malgré des circonstances parfois glauques, donne irrésistiblement envie de se rendre dans la Cité des Papes pour approcher de plus près, saisir et s’imprégner de l’ambiance que seuls peuvent définir ces passionnés « théâtreux ».

Je ne regrette en rien l’emprunt de ce délicieux roman, reste plus désormais qu’à trouver ma fameuse recette. Je vous laisse donc, chers lecteurs.

Bonne lecture.

Bruno

 avigon grève 2003

  •  * Claudie Gallay réside à une quarantaine de kilomètres d’Avignon et connaît particulièrement bien la région. Les descriptions des lieux sont saisissantes de précision.
  • **  Pour en savoir + sur ces évènements  ( Source : Ina.fr ) = http://www.ina.fr/video/2343432001006

 Extraits : 

 "Odon sort. Il trouve le curé assis à la table du jeu d'échecs. Il prend la chaise en face. Il a le visage sombre.

- A quoi tu penses? demande le curé.
- A tout ce que je voudrais faire et que je ne ferai pas.
- Et alors?
- Alors rien.... Ça me désespère.
Il s'est disputé avec Julie. Elle dit qu'il est de droite. Ça l'a blessé. Il n'est pas de droite. Plus de gauche. Elle, elle est vraiment de gauche, idéaliste, sentimentale, elle croit que l'homme est bon. Depuis quelque temps, les bons sentiments, la fraternité, ça l'agace. Il lui arrive même de penser que l'homme est pervers, médiocre et jaloux.
Est-ce qu'il vieillit?"

« Vieillir, ce n'est rien quand on se souvient. C'est l'oubli qui fait la souffrance... »

« L' amour est une île, quand on part on ne revient pas. »

« Des grévistes sont couchés sur les marches qui montent aux portes du palais. Ils sont une vingtaine. Les corps cassés, les bras, les nuques. Ont dirait des fusillés. Une banderole est placardée derrière eux, des lettres rouges, Nous sommes morts. »

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Commentaires
A
Un roman qui m'avait déçu : je ne m'étais pas attachée aux personnages.
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