Les affreux de Chloé Schmitt
"Grandir et crever. Même avec plein de choses au milieu, c'est pas une vie."
D'un jour à l'autre, un homme perd l'usage de son corps. Pas tout à fait mort, plus réellement vivant, il assiste, impuissant, au spectacle d'un monde sur lequel il n'a plus prise. Lâche, cruel, vulgaire. Le monde tel qu'il est ou tel qu'il le voit ?
Dans un souffle furieux, porté par une langue heurtée et sans cesse réinventée, ce roman raconte la déchéance d'un homme et, au-delà, l'impossible communication dans une société qui court à sa perte.
A seulement vingt et un ans, Chloé Schmitt fait preuve d'une grande maîtrise et révèle, à travers ce texte sombre et corrosif, une impressionnante puissance d'écriture.
C'est grâce au match littéraire organisé par Price Minister que ce livre est arrivé jusqu'à moi.
Nous faisons connaissance avec Alfonse Maubard. Il se lève un matin, commence à sentir une terrible douleur, se met à tituber... Et s'écroule.
Lorsqu'il se réveille, le verdict est impitoyable : AVC... trois lettres qui vont l'enfermer dans son corps.
Ce corps ne fonctionne plus, ce corps le lâche, et pourtant, ce corps encombre tout le monde... à commencer par Alfonse dont le cerveau fonctionne encore parfaitement.
Voilà un roman uppercut...
Bien sur, nous connaissons malheureusement tous quelqu'un frappait avec plus ou moins de gravité par cette terrible maladie.
Bien sur, nous compatissons tous de voir ce proche ou cette connaissance dans un état de dépendance plus ou moins grande.
Bien sur, nous éprouvons tous de l'admiration lorsque nous voyons cette personne continuer à vivre malgré ce corps abîmé.
Mais ce que nous ne faisons pas tous, c'est de nous mettre à la place de celui qui se retrouve ainsi enfermé dans un corps qui ne répond plus avec pourtant la pleine conscience de son état.
C'est ce que fait avec brio Chloé Schmitt dans ce roman court, incisif, douloureux, perturbant et violent.
Les phrases sont courtes et donnent un rythme percutant à cette histoire.
Cette jeune fille de 21 ans fait preuve de beaucoup de courage de s'être attaquée à un sujet si difficile pour un son premier roman.
Elle fait également preuve d'une grande maturité et d'un regard sur la vie extrêmement juste (bien que plutôt sombre, malgré tout).
En effet, de la maturité, alors que l'on a encore toute la vie devant soi, il en faut pour affirmer :
"Une belle mort doit être vide de tout espoir."
ou bien
"Quand on s'oublie soi-même, il y a jamais personne pour vous retrouver."
Bien que ce livre soit douloureux et difficile, je donne à ce livre "Les affreux" un 17/ 20, parce qu'il est aussi bouleversant.